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Bois raméal fragmenté made in Ségala

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C’est à l’occasion d’une journée de formation organisée par l’APABA (Association pour la promotion de l’agriculture biologique en Aveyron) que Jacky Dupéty, le ‘pape’ du BRF* est passé nous voir dans notre Ségala profond.

* BRF : bois raméal fragmenté = jeunes rameaux broyés qu’on épand au sol à l’automne sur 3 cm avant de les incorporer en surface afin que les champignons qui s’y développement démultiplient la vie du sol en reproduisant le riche écosystème d’un sol de forêt. C’est probablement la méthode la plus rapide pour soigner un sol dégradé

Au menu : micro-conférences, broyage de branches de chêne (et un peu d’épine noire) avec le broyeur Jean Pain acquis en collectif par l’association ‘la Compagnie de l’Humus’ (qu’on pourrait appeler les humuites), visite du jardin de Stéphane, questions diverses et variées.

J’ai déjà pas mal écrit sur le BRF et vous trouverez sur le net beaucoup de documentation (surtout en français, pour une fois), ainsi qu’au moins deux livres très bien faits. Voici quelques conseils issus des échanges avec Jacky Dupéty (mais qu’on peut probablement trouver au moins déjà en partie dans les livres) :

Ne pas avoir peur des bois tanniques

C’est une crainte qui revient souvent dans les discussions : le chêne et le châtaignier (lesquels dominent nos forêts et nos vieilles haies) seraient trop tanniques pour faire un bon BRF. Jacky nous dit qu’il broie essentiellement du chêne sur son causse quercynois, et qu’il n’y a pas vu de problème. Au contraire, dans la mesure où ces espèces sont des variétés des forêts matures (le climax), le BRF qui en résulte aurait plutôt la capacité à faire vivre dans le sol un écosystème plus mature, donc plus riche.

Ne pas avoir peur de la faim d’azote

Voilà, le mot est lâché — de toute façon, on ne peut pas parler de BRF sans que quelqu’un évoque cette fameuse faim d’azote. Il se trouve en effet que le BRF est riche en carbone, et que l’activité de vie du sol qu’il suscite via la croissance rapide de champignons a tendance à accaparer temporairement l’azote disponible dans le sol. Cet azote sera à nouveau disponible pour les plantes une fois que le nouvel écosystème est installé, au bout de quelques semaines.

C’est ce phénomène qui intimide bien des jardiniers, puisqu’on risque de voir les jeunes plants souffrir voire s’étioler (avant de repartir de plus belle s’ils sont encore en vie à la fin de l’épisode). Certains seraient tentés d’azouter un peu d’amendement à leur BRF pour ‘aider’, mais apparemment, il vaudrait mieux s’abstenir car les champignons supportent mal ce genre de dopants.

En fait, il faut répéter que ceci n’arrive qu’une fois : la première fois qu’on met du BRF sur une parcelle. Ensuite, quand l’écosystème est établi, tout se poursuit normalement, et il n’y aura pas de nouvelle faim d’azote lors de futurs épandages de BRF tous les 3 à 5 ans. Si en plus on prend soin d’épandre dès le début de l’automne (pour peu qu’il pleuve au lieu de faire 30 °C comme en ce moment), le phénomène prendra fin d’autant plus tôt au printemps suivant.

Ne pas avoir peur des terres ‘lourdes’ ou acides

Chez nous, le sol est assez argileux. J’ai eu écho par certains étudiants en maraîchage que le discours théorique qui circule serait que le BRF est bon en terrain calcaire, mais qu’il est moins efficace en sol acide ou lourd car il conduirait à une forme d’humus indisponible pour les plantes.

Je ne suis pas spécialiste des sols — Jacky Dupety non plus, comme il se plaît à le souligner — mais il y a quelques constats qu’on peut faire pour se rassurer quant à nos terres lourdes (et acides en ce qui concerne le Ségala). D’une part, ce sont des régions de forêt. Ici, une parcelle laissée en friche retourne à la forêt en quelques années. C’est donc quelque part que le sol forestier est l’état stable de notre écosystème. Si c’est le cas, il semble étrange que le BRF ne soit pas une bonne chose pour ce sol, à fortiori s’il s’agit de broyat d’espèces d’arbres environnantes. D’autre part, Jacky nous a fait part d’une expérience au Burkina sur un sol latéritique (sol tropical argileux lessivé, stérile, souvent acide et extrêmement dur), recouvert de BRF avant la saison des pluies, dans lequel les gens ont pu semer du mil et du sorgho dès la saison suivante.

Pour que ça marche…

Jacky a conclu en précisant que dans la plupart des expériences malheureuses de BRF qu’on lui a rapportées, le ratage s’expliquait par un non-respect des ‘préceptes’ :

  • bois de feuillus
  • 7 cm de diamètre maxi des branches
  • épandage en automne dans les 24 à 36 heures après broyage (pas besoin de s’occuper de la lune)
  • couche de BRF de 3 à 5 cm
  • incorporation aux premiers centimètres du sol quand le mycélium (filaments blancs) a bien colonisé le BRF

Je suis toujours assez méfiant quand on relève les menus écarts à une stricte orthodoxie pour expliquer les échecs d’un dogme, mais je me promets d’essayer proprement sur une planche du potager cet automne, en m’appliquant religieusement (et on comparera avec une planche témoin, peut-être pendant plusieurs saisons … dans mes rêves).

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