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Utiliser l’aubier de feuillus pour imiter les BRF ?

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La conférence sur les BRF du 29 Mars 2008 à Rodez

J’ai assisté il y a quelques semaines à la conférence (applaudissez, c’était sa première !) d’Eléa Asselineau (alias Lili Revival) au lycée agricole de La Roque à Rodez.

Plus que la partie magistrale (où l’on retrouvait essentiellement le contenu du livre que j’avais déjà lu, avec quelques histoires personnelles en plus), c’était pour rencontrer les gens que j’y allais. Je n’ai pas été déçu. Il y avait mes amis de la compagnie de l’humus, il y avait l’association biodiva, il y avait un responsable du lycée agricole, très ouvert et très actif (que j’avais déjà rencontré auparavant, mais dont je n’ai toujours pas retenu le nom [note du 22.04.08 : c’est Franck Bocher]), il y avait Sophie Hugonnenc, de l’association Arbres, Haies et Paysages de l’Aveyron, et d’autres personnes fort intéressantes même si je n’ai pas eu le temps de collecter leurs noms. Et il y avait Eléa Asselineau. L’échange de questions-réponses a été très enrichissant, ainsi que les discussions spontanées et les prises de contact qui ont suivi.

Mais je m’égare. Je relatais la conférence simplement pour faire part d’une idée que j’ai eue, que j’ai soulevée dans les questions-réponses, qui a reçu un bon accueil, et qui mériterait sans doute d’être essayée.

Utiliser l’aubier de feuillus comme BRF

Il y a deux ans, j’avais commandé du bois de chauffe auprès de la grosse scierie du coin. Comme je ne savais pas quand ma maison serait correctement isolée, ni quand le poêle définitif serait installé, j’ai opté pour l’option la moins chère, et la scierie m’a livré vingt-huit stères de dosses de sciage.

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Je me suis retrouvé avec un tas de six mètres de long, trois mètres de large et presque deux mètres de hauteur dans le jardin. Un monticule particulièrement disgracieux et encombrant. Comme je me suis contenté de débiter le tas au fur et à mesure des besoins, le tas est demeuré tel quel pendant quasiment deux ans. C’est seulement maintenant que j’en viens finalement à bout, et que je découvre le sol qui était resté couvert tout ce temps.

Ce sol est d’un spectaculaire brun-noir granuleux, plein de galeries de toutes les tailles, doux au toucher et sous les pas, et quasiment pas collant, même après la pluie. C’est presque contre-intuitif. Mon terrain est en effet très argileux (nous sommes sur un plateau schisteux, une terre argileuse et acide), et dès qu’on y marche ou qu’on y roule, la terre se transforme en infâme gadoue marron clair. Sous ce tas de bois extrèmement lourd, on pourrait imaginer la terre toute compactée par deux ans de tassement. Et c’est le contraire qui se produit.

Retrospectivement, maintenant que j’ai lu plus de choses sur le fonctionnement des sols, les effets bénéfiques du tas sont très compréhensibles :

  • il empêche le passage, donc prévient le tassement ;
  • il offre un abri aux petites bêtes qui creusent des galeries ;
  • il agit comme un paillage et protège la surface du froid, de la pluie, du vent ;

Mais il reste une question : pour entretenir toute cette vie qui remue et amende le sol, il faut que le tas lui amène de la nourriture. Sous le tas, on voit pas mal de filaments blancs de mycélium. Or je croyais que le bois dur était difficile à décomposer par le mycélium, et que c’est pour cela qu’on recommande d’utiliser les rameaux et branches de petit diamètre pour aggrader le sol grâce au bois raméal fragmenté. Or mon tas n’est pas fait de rameaux. A en juger par la taille des dosses, les arbres utilisés avaient un diamètre d’au moins 50 cm.

J’ai compris en regardant mieux. Quand j’ai tiré les dosses de tout en bas, celles qui étaient restées au contact du sol pendant ces deux années, j’ai vu que les bords et le dos étaient souvent plus “pourris” que le coeur. En regardant le bas du tas, on voit sur les extrémités des dosses un changement de couleur très net entre l’aubier et le bois de coeur. Et très souvent, l’aubier est colonisé de champignons, au point qu’on voit des “oreilles” de champignons sur toute une couronne extérieure pendant que le bois de coeur est intact.

Aubier et champignons Une dosse, le bois et l'aubier

J’avais rénové la charpente de ma maison. J’avais nettoyé les vieilles poutres en chène. J’avais construit plusieurs portes et plusieurs meubles dans mon atelier de menuiserie. J’étais bien placé pour savoir la différence entre l’aubier et le bois de coeur. Les insectes xylophages n’attaquent que l’aubier, surtout si l’humidité a permis aux champignons de le prédigérer. Dans ma cuisine, on voit très nettement une différence entre les arètes des poutres, plus claires et piquées de trous de vrillette, et le milieu, parfaitement intact. Alors qu’on peut souvent gratter l’aubier avec un tournevis ou avec l’ongle, il est quasiment impossible de planter un clou dans le coeur de ces poutres multicentenaires à moins de faire un avant-trou avec une mèche à métal.

Un voisin m’avait prévenu : “ces dosses, c’est pas cher, mais c’est vraiment pas du bon bois pour se chauffer ; c’est pratiquement que de l’aubier”. Ainsi, mon tas de bois était en réalité principalement un tas d’aubier, et les champignons aiment bien l’aubier. Voilà comment mon tas nourrissait la vie du sol et a permis la spectaculaire transformation.

Comment aggrader le sol avec des dosses de scierie ?

Ce que j’ai commencé de faire pour la cour est peut-être une première réponse. Sur le même principe, on peut envisager de débiter les dosses dans des sections suffisamment petites pour qu’elles passent au broyeur. On peut alors probablement s’en servir comme on se servirait de BRF. Surtout si en scierie le bois a été scié vert.

Mais comme je suis partisan du moindre effort, je vais aussi essayer autre chose. Je prendrai les dosses les plus fines, celles qui ne contiennent quasiment que de l’aubier. Je les disposerai en rangées, à même le sol du potager, et je sèmerai ou planterai au niveau des interstices. Je paillerai par-dessus. J’aurai ainsi une belle réserve de fertilité forestière incorporée dans mon potager pour plusieurs années (et aussi de magnifiques abris à limaces).

Comme la surface de contact entre le sol et le bois est plus faible qu’avec des bois fragmentés, j’imagine que la technique se prête moins à l’aggradation rapide d’un sol trop fatigué. Mais comme apport ultérieur et durable pour un sol déjà correct, ça doit être intéressant. Surtout si ça évite l’étape ‘broyeur’.

Si ça marche, je demanderai à mon scieur de faire un tas avec les dosses les plus fines, qui n’intéressent certainement pas les gens qui veulent les utiliser pour se chauffer. Ou bien je viendrai faire mon marché moi-même. J’imagine qu’il m’en fera cadeau, mais même dans le cas contraire, au prix où sont les dosses (500 € les 30 stères), on doit tomber à 0.5€ par mètre carré ‘traité’.

La grosse limitation, c’est qu’il faut être à proximité d’une scierie. Même si les dosses sont plus denses que des branchages ou même que du broyat, il faut éviter de leur faire parcourir des kilomètres.

Post scriptum

Je viens de soumettre l’idée sur le forum des jardins de BRF. On verra si ça intéresse d’autres personnes.

Lire aussi

Mon article introductif sur le BRF (avec de nombreux liens)
Broyat de chutes de scierie en couvre-sol
Mon premier BRF

Liens externes

La discussion sur le forum des jardins de BRF


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